Photo est faite d’un fond de scène noir, acheté sciemment dans un laboratoire photo, et monté sur un faux-cadre, comme une toile d’artiste-peintre.
Le tout a ensuite été recouvert d’un pochoir, percé d’un cercle de 16 pouces en son centre : un sténopé hors dimension. J’ai placé le tableau pendant neuf mois au soleil, devant une de mes fenêtres, dirigé vers le ciel.
Le tissu, visiblement sensible à la lumière, mais sans émulsion particulière, a pâli; à sa surface s’est formé une trace : l’image manifeste de ce cercle, un cerne, une auréole blême. C’est la photographie dans son plus simple appareil, sans appareil. Un support, un trou, de la lumière, une impression… Une camera obscura des plus basiques. Là encore, évidemment, le temps à joué son rôle d’élément transformateur. Le but n’était évidemment pas d’obtenir une vue en deux dimensions proche de la vision humaine, puisque le support n’avait aucune prédisposition particulière à la captation, qu’en plus, la prise de vue était très longue, que le procédé n’utilisait pas de lentille (à part la vitre de la fenêtre), et que l’ouverture était trop grande.
L’image obtenue allait sans aucun doute être surexposée, uniforme, et clairement distincte du reste de l’espace pictural. L’idée était aussi très simple, voire simpliste : photographier le soleil grâce à ses rayons ultra-violets. Une étoile dans le cosmos, le fond de scène noir représentant l’arrière-plan suprême : l’univers.